Les carreaux de ciment fascinent par leur beauté, leurs motifs, l’intensité de leurs couleurs et leur durabilité. Partout dans le monde, d’anciennes fabriques renaissent et retrouvent un beau dynamisme, établissant des collaborations avec des créateurs, des architectes, des associations de restauration du patrimoine… Parfois ces petites fabriques artisanales acceptent d’accueillir des particuliers, « mordus » de déco, qui souhaitent participer à la production de leur propre carrelage.
Un superbe sol en carreaux de ciment, répertorié par l’association Restaurika, dans une maison ancienne de Monterrey au Mexique
Les premiers carreaux de ciment ont été imaginés en France vers 1850, en Auvergne, une région où l’industrie de la cimenterie était naissante à l’époque. C’est Étienne Larmande, un entrepreneur de travaux publics, qui mit au point ce procédé de fabrication si particulier, qui de nos jours encore reste presque exclusivement manuel. Grâce aux brevets, la méthode s’est exportée et on trouve encore aujourd’hui quelques entreprises artisanales qui produisent des carreaux de ciment en Amérique Latine, aux Etats-Unis ou en Europe.
Chaque couleur est versée dans un moule diviseur, une pièce cruciale du processus, régulièrement passée au marbre, pour assurer sa planéité et sa parfaite adhérence. Un défaut d’étanchéité pourrait en effet provoquer des fuites d’une alvéole à l’autre et gâcher le motif du carreau de ciment
L’opérateur coule les mortiers colorés un à un (sur quelques millimètres) dans chaque compartiment du moule diviseur (fabriqué en bronze ou en laiton). Le mortier, très liquide, est composé d’un mélange d’eau, de ciment blanc, de poudre de marbre blanc, de pigments ou d’oxydes.
Une fois le motif constitué, le diviseur est délicatement retiré. Les couleurs se mélangent en surface inévitablement lors du retrait du moule, mais la couche en contact avec le fond (face visible du carreau) reste bien figée et se fixe
Immédiatement, le moule est rempli d’un mélange sec de mortier grossier de sable et de ciment gris (plus économique) et le cadre est fermé avec un tampon. L’ensemble est alors pressé grâce à une presse hydraulique. Sous l’effet de la pression, l’eau contenue dans la couche colorée remonte dans la couche de béton, homogénéisant l’ensemble des matières.
Chaque étape de la fabrication des carreaux de ciment requiert de la délicatesse et une bonne dextérité manuelle de la part de l’ouvrier
En fin de journée, les carreaux sont plongés dans de grands bacs d’eau. Cette opération permet au ciment de s’hydrater et de commencer sa prise. Après un séchage de trois semaines sur des étagères, les carreaux aux motifs éclatants sont fins prêts à être posés.
Les carreaux de ciment sont produits selon une technique relativement sobre en énergie, sans cuisson, par pression et sèchent à l’air libre
On estime qu’un bon opérateur peut produire en une heure 4 à 6 carreaux (il faut 25 carreaux pour 1 m2) – ce qui explique leur coût très élevé. Heureusement, il existe de très beaux carrelages qui imitent parfaitement les carreaux de ciment, en reprenant d’anciens motifs floraux et végétaux très en vogue au milieu du XIXème siècle, avec leur taille traditionnelle de 20×20 cm. L’épaisseur du carrelage est moins importante (6 à 8 mm) que celle du carreau de ciment (12 à 15 mm), ce qui peut être un atout et avoir son importance lors d’une rénovation.
Un catalogue des modèles de moules proposés par les établissements Ardechois « Lachave & Fils » datant du milieu du XIXème siècle, retrouvé dans les archives d’un fabricant de carreaux de ciment Mexicain
Carreaux de ciment avec un motif ancien
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