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Muraille de Chine Des scientifiques chinois, conduits par Bingjian Zhang, viennent de découvrir que le mortier servant à sceller les briques de la muraille de Chine contenait du riz gluant. En effet, ce mortier est réalisé à partir d’une soupe de riz gluant (amylopectin, un hydrate de carbone complexe) et de chaux (carbonate de calcuim). Ce qui expliquerait peut-être la longévité du monument.
Zhang n’hésite pas à qualifier cet ajout d’un élèment organique à un élèment minéral, comme « l’une des plus grandes innovations technologiques de l’époque ». En effet, des pagodes, des tombeaux et des murs érigés grâce à ce mortier sont encore debout ; certaines structures résistent même aux bulldozers et aux tremblements de terre.
D’après les tests réalisés, l’ajout de riz cuit augmente sensiblement la résistance mécanique du mortier. Ce mortier s’avère évidement un mortier de restauration adapté à la maçonnerie ancienne. Une découverte qui confirme l’habileté et la créativité technique des générations précédentes.

Source : American Chemical Society, mai 2010

[Edit du 10 avril 2017]
Voici la traduction de l’étude (texte original en anglais, lien ci-dessus)

« Le remplacement ou la réparation du mortier de maçonnerie est habituellement nécessaire dans la restauration des constructions historiques, mais la sélection d’un mortier approprié est souvent problématique. Un choix inapproprié peut entraîner une défaillance du travail de restauration, et peut-être même d’autres dommages. Ainsi, une compréhension approfondie de la technologie originale du mortier et la fabrication de matériaux de remplacement appropriés sont des objectifs de recherche importants.

De nombreuses sortes de matériaux ont été utilisés au cours des années dans des mortiers de maçonnerie, et la technologie a progressivement évolué du mortier monocomposant de l’Antiquité aux versions hybrides contenant plusieurs ingrédients. À partir de 2450 avant notre ère, la chaux a été utilisée comme mortier de maçonnerie en Europe. À l’époque romaine, des cendres volcaniques broyées, de la poudre de brique et des copeaux de céramique ont été ajoutés au mortier à la chaux, améliorant considérablement les performances. En raison de ses propriétés supérieures, l’utilisation de ce mortier de mortier hydraulique (c’est-à-dire capable de se poser sous l’eau) a été adoptée dans toute l’Europe et l’Asie occidentale. Peut-être en raison de l’absence de matériaux naturels tels que les cendres volcaniques, la technologie de mortier hydraulique n’a pas été développée dans la Chine ancienne. Cependant, un matériau de construction composite inorganique-organique spécial, un mortier collant de riz et de chaux a été développé. Cette technologie a été largement utilisée dans les bâtiments importants, comme les tombeaux, les constructions urbaines, et même dans les installations de conservation de l’eau. C’est peut-être la première technologie de mortier composite inorganique-organique répandue en Chine, ou même dans le monde. Dans ce compte, nous discutons les origines, l’analyse, la performance et l’utilité dans la préservation historique du mortier collant de riz et de chaux.

Les échantillons de mortier provenant de constructions anciennes ont été analysés à la fois par des méthodes chimiques (y compris le test d’amidon d’iode et l’expérience d’attaque acide) et les méthodes instrumentales (y compris la calorimétrie de balayage différentiel thermogravimétrique, la diffraction des rayons X, l’infrarouge à transformée de Fourier et la microscopie électronique à balayage). Ces résultats analytiques montrent que l’ancien mortier de maçonnerie est un matériau composite organique-inorganique spécial. Le composant inorganique est le carbonate de calcium, et le composant organique est l’amylopectine, qui provient vraisemblablement de la soupe de riz collante (sticky rice soup) ajoutée au mortier.

Une étude systématique de la technologie collante du mortier au riz et à la chaux a été menée afin de déterminer les bonnes pratiques dans la restauration des bâtiments anciens. Des mortiers de chaux avec du riz collant variable ont été préparés et testés. Les propriétés physiques, la résistance mécanique et la compatibilité du mortier à la chaux ont été considérablement améliorées par l’introduction de riz collant, ce qui suggère que le mortier collant de riz et de chaux est un matériau approprié pour réparer le mortier dans la maçonnerie ancienne. En outre, l’amylopectine dans le mortier à la chaux a été jugée comme un inhibiteur; La croissance des cristaux de carbonate de calcium est contrôlée par sa présence, et une structure compacte résulte, ce qui peut expliquer les performances améliorées de ce composite organo-inorganique par rapport au mortier de chaux ne contenant qu’un élément.




28 réflexions sur “Construction : Mortier riz gluant et chaux

  • Je pense qu’en Asie c’est comme en Afrique, il n’y a pas d’eau de cuisson de riz restante. Ce n’est pas l’Europe et le riz cuit dans des litres d’eau qui est jetée par la suite (riz à la créole ??). Donc je pense plutôt pour une sorte de farine de riz mélangée à de l’eau qui est ensuite cuite et réduite en pâte avant d’être ajoutée à la chaux ! Bref, il faut tester pour savoir !

    Répondre
  • Je viens de tomber sur cette évocation d’un mortier comportant du riz gluant dans sa composition. Pour avoir utilisé du riz gluant, permettez moi ces quelques réflexions:
    Cette variété spécifique de riz n’est gluante qu’une fois cuite.
    En Asie, on ne cuit pas le riz à grande eau pour jeter ensuite l’eau de cuisson, au contraire, on le cuit dans la quantité juste nécessaire pour qu’il gonfle et cuise. On utilise aussi la vapeur sur du riz détrempé. Enfin on réalise une soupe de riz qui est consommée agrémentée de légumes, poisson ou viande, etc. On cuit peu de riz dans beaucoup d’eau jusqu’à ce que les grains se défassent et se transforment en bouillie. Cette soupe de riz n’utilise pas de riz gluant mais du riz ‘normal’. Le riz gluant est plus un plat de fête, il est plus cher et plus rare.
    On utilise couramment en cuisine les farines de riz, tant normal que gluant, souvent mélangées par économie ou pour des textures différentes, pour obtenir des préparations justement gluantes, c’est une consistance qui est appréciée par les palais asiatiques ( les japonais confectionnent des « mochis » notamment).
    Cette pâte de riz gluant est fabriquée à partir de riz gluant réduit en farine puis délayé avec une quantité restreinte d’eau bouillante puis cuit et ensuite refroidi avant consommation.
    Ayant vécu une quinzaine d’années en Asie, il n’était pas rare d’utiliser en guise de colle un grain de riz cuit, rescapé d’un repas, juste écrasé.
    Tout ceci pour vous dire donc que je ne trouve pas du tout capillo-tracté qu’un esprit curieux ait pensé à expérimenter et exploiter les propriétés du riz gluant dans la confection d’un mortier.
    Après tout, on pourraient aussi se perdre en conjectures diverses et saugrenues au récit de la découverte de corps humains enfouis sous les murs d’habitats européens anciens. (Ça ne rend pas les édifices plus solides, si? Lol). Ou admirer un tableau et apprendre qu’il entre des oeufs ou du sang, voire des excréments dans la composition de ce qui recouvre le support…
    Voili voilou, parole de cuisinière ! (Je n’ai plus très faim étrangement)

    Répondre
    • Merci Patricia, votre retour en tant que cuisinière connaissant bien l’art culinaire asiatique est fort intéressant ! Dans mes ateliers de peinture home made, je dis souvent que les cuisiniers sont avantagés ; ils sont plus rapidement à l’aise avec les recettes, savent intuitivement si une texture est bonne ou pas, n’hésitent pas à modifier les proportions, à mettre leur grain de sel – ce à quoi je les encourage vivement !
      Je ne savais pas pour le grain de riz écrasé utilisé en colle expresse :-) Voir la recette de colle de riz qui donne un autre éclairage et met en avant la colle de natto en tube que tous les écoliers nippons connaissent et utilisent !
      Culinairement vôtre,
      Nathalie

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